Hohatzenheim sous la réforme



Dès 1519, les thèses de Martin Luther furent affichées aux portes de la cathédrale de Strasbourg et les dirigeants de la ville, notamment Jacques Sturm, se montrèrent favorables à ce changement. La ville adopta la Réforme en 1525 et dans la foulée la plupart des couvents seront supprimés. Parmi les couvents masculins, le couvent des cordeliers fut remis à la ville dès 1525. Les derniers dominicains furent pensionnés en 1530. Les chanoines de Saint-Arbogast cessèrent la vie conventuelle en 1530. Les guillelmites remirent leur couvent à la ville en 1533. Le couvent des Augustins fut transformé en hospice des pauvres passants en 1534. Le couvent des carmes fut supprimé en 1538. En revanche la chartreuse située hors des fortifications subsistera jusqu’en 1591. De même les deux maisons de chevaliers, la commanderie de Saint Jean et la commanderie teutonique  relevant directement de l’empire résistèrent à la réforme jouèrent un rôle actif de contre réforme. Parmi les couvent féminins, quatre des sept que comptait la ville furent sécularisés dès 1525 : deux couvents de clarisses, Sainte-Claire-au-Marais et Sainte Claire du Marché aux Chevaux, deux maisons de dominicaines, Sainte Catherine et Saint Marc mais les dominicaines de Saint-Nicolas-aux-Ondes survivèrent jusqu’en 1592 comme les pénitentes de Sainte Madeleine. Quant à Sainte Marguerite elle résista opiniâtrement et deviendra à la fin du XVIe siècle le dernier couvent féminin.  Strasbourg devint officiellement protestante en 1532 avec l’adhésion à la Confession d'Augsbourg. Par contre, en ce qui concerne la campagne autour de Strasbourg, les progrès de Réforme vont être plus lents.

 

 

Progrès des idées de la réforme dans le comté de Hanau-Lichtenberg

 

Les sources concernant les progrès de la Reforme dans le Comté de Hanau-Lichtenberg divergent ce qui tend à indiquer que le changement ne fut pas forcément soudain dans les communes et qu’il put y avoir des périodes transitoires. Nous donnons ci-dessous la version de Mr. Seyfried (« La réforme dans le comté de Hanau-Lichtenberg » in « Revue catholique d’Alsace » 1883) :

 

En 1525, Philippe III essaya d'introduire la Réforme dans .ses dépendances. Il était encouragé dans son projet par son intendant Fliesbach. Les deux s'adressèrent à Gapito qui, jugeant que le moment d'innover était peu favorable, ne répondit pas à l'appel. L'introduction de la Réforme dans la Seigneurie de Hanau Lichtenberg fut donc l'oeuvre de Philippe IV secondé par son épouse Eléonore de Furstenberg. En 1542, Il appela à Bouxwiller, Théobald Groscher, prêtre évangélique de Hohatzenheim et ami de Luther, pour enseigner la Réforme à la chapelle seigneuriale de Bouxwiller. Malgré cela, les progrès furent lents. Bucer aux conseils duquel on eut recours suggéra en 1544 d'abolir la messe. Philippe IV répondit l'année suivante par un plan de réforme qui maintenait la messe, le chant des Psaumes en latin, l'habit liturgique, même la confession et demanda des auxiliaires pour Groscher. Ceux-ci étaient Conrad Schnell, que le Magistrat de Strasbourg avait nommé a St. Thomas en 1540, sortit d'un atelier de menuiserie, où selon son expression « il avait raboté plus deplanches qu'il n'avait lu de livres. » Jean Schott, curé d'Illkirch, avait été cordonnier, Nicolas Acker, curé d'Itlenheim, avait exercé le métier d'aide-imprimeur, ainsi que Barthélémy Westheimer, curé de Horburg. Malgré cette pénurie, Bucer avisa et adressa à Philippe les trois diacres Christophe Sôll, Laurent Offner, Anselme Pfluger. Les deux premiers furent destinés à l'apostolat des cinq bailliages de l'Alsace; au dernier échut la mission d'évangéliser le baillage situé sur l'autre côté du Rhin. Peu de temps après, grâce à l'influence de l'homme d'affaires du Comte qui résidait à Strasbourg, un quatrième apôtre vint au secours des trois premiers: c'était Pantaléon Blasius que l'on réservait pour la cure importante de Pfaffenhoffen.

 

Philippe IV réunit alors à Bouxwiller les prédicants et les curés des paroisses situées dans ses dépendances afin de leur poser la question s'ils reconnaissaient la Confession d'Augsbourg comme règle de foi. Blasius ouvrit cette espèce de synode par un discours dans lequel, suivant l'usage reçu, il stigmatisa les abus du papisme. De l'église les honorables prédicants se rendirent à l'hôtel de ville où le prévôt Jean Knobel, secondé par le secrétaire du Comte, Jean Fleichbein, exhorta vivement les membres réunis à suivre en tout les sages conseils de maître Blasius. La proposition émise par ce dernier, d'accepter la doctrine luthérienne comme règle de foi ne rallia que sept membres: Théobald Groscher, curé de Bouxwiller, Christophe Sôll, curé de Kirrwiller, Christophe Meyer, curé de Westhoffen, Jean Weinbrenner, curé de Balbronn, Nicolas Klein, curé de Schwindralzheim, Jacques Stendinger, curé de Breunsheim, Reichard Sigrist, curé d'Obermoderen. Chacun d'eux reçut dès lors un formulaire de la « Réformation de Cologne » avec injonction de l'introduire dans sa paroisse.

 

Blasius organisa la nouvelle communauté évangélique et y incorpora: Pfaffenhoffen; Bouxwiller avec Riedheim, Uttwiller, Niedersoultzbach, comme annexes; Kirrwiller et Issenhausen, Bossenshausen, Wilshausen, Wickershausen et Zœbersdorf; Westhoffen; Ballbronn; Schwindratzheim; Breunsheim avec Imbsheim et Geiswiller; Obermodern avec Bischholtz, Schalkendorf et Menchhoffen. Peu après, les curés de Niederbetschdorf et de Rittershoffen suivirent l'exemple de l'apostasie. Lorsqu'en 1546 les paroisses de Reitwiller et de Gimbrett devinrent vacantes, le comte Philippe leur imposa de force Melchior Specker en qualité de pasteur luthérien. Il agit de même pour Eckendorf et Oberaltorf qui furent confiés à Caspard Reichbach. Eu 1547, il nomma Georges Jaeger à Duntzenheim avec Hochfranckenheim et Waellenheim; Simon Schelling à Emolsheim (1550); Jacques Kliffter à Trœnheim (1556); Sébastien Mercklin à Hatlen (1557). En 1562, c’est au tour de paroisse de Neuwiller de passer à la Réforme après un coup de force. Neuwiller. Ce fut Conrad Lautenbach, ancien curé de Dorlisheim, qui fut chargé d’organiser la paroisse.

 

En 1560, la seconde moitié de la Seigneurie de Lichtenberg, c'est-à-dire les bailliages d'Ingwiller, de Brumath, de Woerth et d'Offendorf avec le bailliage de Lichtenau au-delà du Rhin échurent à Philippe V par suite de son mariage avec Marguerite Louise, nièce et héritière de Jacques de Deux-Ponts-Bitsche. Aussitôt les deux Comtes de Hanau unirent leurs efforts pour amener la réforme à ce nouvel héritage. Dès 1570, Philippe IV écrivit au prévôt d'Offendorf qu'il avait appris avec peine que des curés papistes se permettaient encore de célébrer la messe dans sa prévôté. Or sa volonté était que cet abus cessât à Offendorf, Herrlisheim, Rohrwiller, Drusenheim et Oberhoffen. Il demanda en même temps une relation sur l'état des presbytères et des églises. Sans consulter les vœux des habitants il envoya un prédicant à Herrlisheim et Rohrwiller avec le titre de curé. Samuel Lissenius vint en la même qualité à Brumath; Antoine Reuchlin à Engwiller; Jacques Ilzalein à Ingwiller dont faisaient partie les annexes de Steinbourg, Saverne, Minversheim, Hochfelden, Ettendorf et Kindwiller desservis par un diacre.

 

Dans le courant de l'année 1571, Veit Lieb se présenta comme curé évangélique à Drusenheim; Jean Appenhofer à Krautweiler; Thomas Gulsance à Wœrth; Zacharie Creuzman à Preuschdorf ; Caspard Weismann à Wolfisheim avec Hangenbielen comme annexe. La paroisse de Lichtenberg avec Wimmenau, Reipertswiller et Offwiller fut mise également sous la houlette d'un pasteur luthérien. L'année 1572 fut marquée par l'arrivée d’André Christian à Griess. Celle de 1573 signale la défection d'Offendorf, dont le premier pasteur fut Anastase Gokenback. Le village de Hohatzenheim fut confié à Conrad Bitchell avec l'annexe de Mittelhausen. Restait Oberhoffen qui résista jusqu'à 1577 et céda enfin, ainsi que Morsbronn à des vexations de tout genre.

 

 

L’introduction de la Réforme à Hohatzenheim

 

D’après cette version ce serait donc à partir de 1573 que la paroisse de Hohatzenheim serait devenue officiellement protestante avec son annexe Mittelhausen. Cette date semble confirmée par l’inscription sur la façade nord de l’église qui indique que l’église est redevenue catholique en 1687 après 100 ans passés à la Réforme mais comme cette inscription date de la fin du XVIIIe siècle, elle n’est pas forcément fiable. D’autres sources suggèrent au contraire que le changement de 1573 ne concernait que Mittelhausen qui serait alors devenu filiale de Hohatzenheim mais que l’église mère était passée à la Réforme beaucoup plus tôt. D’abord, le fait que Groscher était prêtre à Hohatzenheim avant sa venue à Bouxwiller suggère que les idées de la Reforme furent introduits au village au moins officieusement dès cette époque. Foehrer indique dans son ouvrage[1] que Groscher, l’ami de Luther, s’est installé à Hohatzenheim le vendredi après le jour de Pâques 1532 (soit le vendredi 5 avril 1532). Il aurait donc eu 10 ans pour diffuser ses idées dans le village.[2] Foesser ajoute que Hohatzenheim fut séparée du baillage de Brumath en 1522 pour être rattachée à Bouxwiller et que le village serait devenu protestant avec le baillage de Bouxwiller, réforme qui débuta dès 1545 dans ce baillage alors que Brumath et Mittelhausen ne passèrent à la Réforme qu’après l’héritage matrimonial de Philippe IV après 1570.


 

D’après Foesser, Hohatzenheim passa à la Réforme en 1548, lorsque le prêtre Augustinus fut expulsé de son presbytère avec violence et s’enfuit dans sa filiale Wingersheim qui, fief impérial, était restée catholique. Il aurait été remplacé par le pasteur protestant Andreas Steinach. Foesser ajoute que l’église fut pillée et que seule la Piéta de la Vierge et quelques ornements purent être sauvés. Malheureusement Foesser ne donne pas ses sources sauf sur le point de l’éviction avec violence où il indique qu’il se base sur une déclaration générale d’une source manifestement catholique qui indique que les églises catholiques furent saisies par les luthériens à mains armées. » La situation de Hohatzenheim en la matière est donc infondée. D’ailleurs si l’église avait été pillée on comprend mal que la Piéta, son joyau, put être sauvée.

 

Si on se base sur une source protestante, à savoir le « Pfarrer-buch der Graftschaft Hanau-Lichtenberg » de Albert Kiefer et Karl Kiefer (1907) on trouve pour la commune de Hohatzenheim le Pasteur Leonard Ehl originaire de Rod (Suisse, près de Zurich ?) qui officia à Hohatzenheim de 1542 jusqu’à sa mort en 1564. On trouve aussi Andreas Steinach qui aurait officié à Hohatzenheim de 1548 à sa mort en 1552.

 

Puis  on trouve deux pasteurs dont les dates de service ne sont pas connues :

 

- Johan Conrad Bügelin de Rottweil (Johan Conrad Biel à Waltenheim vers 1570 ?)

- Johan Happersberger de Bobenhausen à Hohatzenheim – ca1570

 

Foesser qui se base sur une précédente version de cette source (de 1890) donne des dates différentes :

Andreas Steinach (1548-1552)

Leonard Ehl  de Rod (1552-1564) [Foesser cite ici aussi la source ABR C55]

Johann Happersberger de Bobenhausen (1564-1572)

Conrad Bügelin (Bischell) von Rotwiel (1572-1584) précédemment à Waltenheim.

 

Cette chronologie est erronée au moins pour Happersberger qui apparait dans un acte de 1581 où il est cité en tant que « Pfarrer in Hohatzenheim. » [AMS - KS212]

 

L’ouvrage de Johann Adam (« Evangelische Kirchengeschichte der Elsaessischen Territorien bis zur Franzoesischen Revolution ») confirme lui aussi la date de 1548 pour l’introduction de la Réforme à Hohatzenheim avec Andreas Steinach.

 

Si on fait le bilan de toutes ces sources, on peut tenter d’avancer la chronologie suivante :

 

Théobald Groscher (1532-1542)

Augustinus (1542 – 1548) - catholique

Andreas Steinach (1548-1552)

Leonard Ehl  de Rod (1552-1564)

Conrad Bügel (Bischell) de Rottweil (1564-av1581)

Johann Happersberger de Bobenhausen (av1581-1584 ?)

 

Hohatzenheim église mère

 

A partir de l’intégration de Mittelhausen dans le comté de Hanau, Hohatzenheim redevient église mère avec Mittelhausen comme filiale. En ce qui concerne la chronologie des pasteurs, les sources sont d’accord à partir de 1584. C’est Foesser qui donne le plus de détails :

 

Konrad Geyer (1584-1622) – précédemment à Waltenheim. Peut-être le père de Hans Geyer qui sur le terrier de 1657 possède une ferme en aval de s’Daniels.

 

Heinrich Nigrinus (1622-1635) - En 1622 le pasteur Nigrinus signale qu’il faut de nouvelles portes latérales à l’église, ainsi que de nouvelles serrures et fenêtres pour la sacristie, car les soldats [de Mansfeld] ont tout cassé. Les objets précieux du culte sont mis en sécurité à Haguenau, puis à Strasbourg, et recherchés uniquement pour les fêtes pascales.

 

Johannes Veith von Strassburg (1635-36) - celui-ci « a volé le calice, l’a vendu et a disparu sans que l’on sache où il est allé »

 

Johan Caspar Sattler (1636-40) - « comme les paroissiens sont partis et que du fait des désordres de la guerre plus personne n’habitait [à Hohatzenheim] ou n’avait plus de moyen de subsistance, les quelques paroissiens ont été temporairement desservis de Mittelhausen par J. Sattler ». Celui-ci se réfugia à son tour à Strasbourg en 1640 où il décéda en 1649.

 

En 1640 Hohatzenheim ne comptait plus que deux bourgeois et fut rattachée à Reitwiller. On peut noter dans le « Pfarrer-buch der Graftschaft Hanau-Lichtenberg » la présence des pasteurs des villages environnants à cette époque :

Reitwiller : Hans Reinhold Hopff 1637-45

Waltenheim:  Johan Ritter 1622-36 puis David Molzheim 1643-52

 

 

 

Hohatzenheim devient de fait filiale de Mittelhausen

 

Jacob Keller von Saarbrücken (1649-50)

 

Hohatzenheim a particulièrement souffert de la guerre avec de grandes destructions. De fait, lorsque le village se repeupla à la fin des années 40 et que le pasteur Jacob Keller de Saarbrucken fut nommé en 1649 pasteur de Hohatzenheim-Mittelhausen il s’installa non pas à Hohatzenheim mais à Mittelhausen. Le presbytère (sur le site de s’Blase d’après le terrier de 1657) était en effet inhabitable. Andreas Veltin reprendra d’ailleurs la propriété à son compte où il construisit probablement une nouvelle maison. A partir de cette date, tous les pasteurs habiteront à Mittelhausen. D’après Foesser, Keller officiera jusqu’en 1650 mais les registres montrent qu’il rédige les actes jusqu’en 1653.

 

Vacance

 

A partir de novembre 1653 il n’y a plus de pasteur dans les deux villages et c’est Samuel Ponthier, pasteur de Waltenheim qui baptise les enfants de Mittelhausen et Hohatzenheim. A partir de janvier 1654, c’est Johann Guntzern qui sert les deux paroisses, puis temporairement d’octobre 1657 à Septembre 1658 Otto Wilhelm Gangeloffen, avant le retour de Johann Guntzern. Il semble pourtant que ces pasteurs ne sont que provisoires.

 

Jean Christian Brandt (1662-1675)

 

A partir de janvier 1662, les deux paroisses sont desservies par Jean Christian Brandt qui se marie en 1663 avec Anna Sybilla fille d’Elias Vogel, propriétaire du château de Mittelhausen [source : procès Vogel - ABR G1710 in Foesser]. On peut penser que le pasteur habita alors le château car il n’y avait toujours pas de presbytère dans les deux villages.

 

 

Johan Henrich Westerfeld ( 1675-1701)

 

Adam dans son ouvrage[3] nous dit que du temps du Pasteur Westerfeld le presbytère de Hohatzenheim détruit pendant la guerre n’avait toujours pas été reconstruit du fait de l’opposition du couvent de Neuwiller à l’entretien des presbytères luthériens. De ce fait, Westerfeld devait habiter à Mittelhausen dans la maison du berger (« un zwar mit solchem unter einem Dach wohnen. ») Sur sa demande pressante, le vicaire général lui accorda 100 Reichstaler sans délai pour faire construire un nouveau presbytère mais ce projet ne vit jamais le jour puisqu’en 1686, les bourgeois de Hohatzenheim choisirent de repasser au catholicisme et Westerfeld fut chassé de l’église mère. Il resta cependant dans la maison du berger jusqu’en 1701, date à laquelle il se réfugia à Strasbourg, peut-être du fait de la guerre de succession d’Autriche. Il y mourut en 1706.

 

 [Source: Adam cite: Str. Stadt-Bibl. M. 732]

 

Hohatzenheim abjure le protestantisme et repasse au catholicisme

 

L’inscription sur le côté nord de l’église donne la date du retour de la paroisse de Hohatzenheim au catholicisme en latin et en allemand :

 

« Dieses alte berühmte Gotteshaus ware über 100 jahr in dem Lutherthum 1687, den 7ten Octobris unter Ludowico XIV. Der wahren Religion wider einverleibt und 1772 erneuert worden Ammen. »

 

«Cet antique et célèbre sanctuaire a été durant plus de 100 ans au luthéranisme. Le 7 octobre 1687 sous Louis XIV il est revenu à la vrai religion et a été rénové en 1772. Ammen. »

 

Foesser cite également le livre de Pèlerinage de l’abbé Wandhammer (« Marianische Wallfahrt », 1771) :

« A cette époque [au temps de la Réforme], les enfants en nourrice appelèrent Maria avec David le prophète couronné : Levavi oculos meos in montes, unde veniet auxilium mihi » Ps 120. Nous posons les yeux sur la montagne de Marie (Atzenheim ) d’où nous est venue aide et consolation : et en vérité, le Grand Dieu entendit la voie des croyants de la vraie foi : de fait en l’année 1687, le 7 octobre, sous le règne du Roi Louis XIV, sans résistance le sanctuaire avec le grand trésor est revenu à la vraie église »

 

Ce jour-là la Pièta fut reconduite en procession de Wingersheim à son ancienne demeure de Hohatzenheim.

[ABR G5462]

 

Foesser veut voir dans ce changement la foi des habitants de Hohatzenheim en leur ancienne religion qu’ils n’auraient pas oubliée. Il cite plusieurs exemples de résistance catholique dans des villages luthériens environnants. D’autre part  Les pèlerinages restaient populaires de même que les jésuites et les capucins qui avaient gardé la confiance des gens.  

 

Les sources protestantes voyaient dans cette conversion des raisons plus prosaïques. D’après Adam qui cite le Pfarrbuch de Kiefer, les habitants de Hohatzenheim abjurèrent le protestantisme « de peur de dangers [militaires français] et de cantonnements plus lourds. » Il ajoute que « les femmes et une partie des fils restèrent fidèles à la foi évangélique. »

 

Il est vrai que depuis la prise de Strasbourg en 1681, Louis XIV appliquait une pression douce sur la province pour favoriser le catholicisme, tout en respectant la liberté religieuse. Mais ceci n’explique pas pourquoi Hohatzenheim s’est reconvertie et pas Mittelhausen et Waltenheim par exemple. A mon avis, le cas de Hohatzenheim est différent  pour trois raisons :

 

- Le pèlerinage ancien de la Vierge douloureuse auquel les gens étaient très attachés et auquel le protestantisme leur demandait de renoncer. La piéta exilée à Wingersheim en était le symbole le plus fort.

- Le curé officiel de Hohatzenheim basé à Wingersheim devait probablement sermonner sans relâche ses anciens paroissiens pour tenter de les reconvertir.

- Politiquement, sous la réforme Hohatzenheim était plus ou moins sous la tutelle de Mittelhausen et Reitwiller. Le rôle de Schultheiss fut longtemps entre les mains du Schultheiß de Reitwiller. Puis il passa à la famille Schmitt, une famille aisée originaire de Mittelhausen. Passer au catholicisme était un moyen de damer le pion au clan « aisé »  et aux étrangers de la commune et d’opérer un changement de pouvoir. D’ailleurs environ 20% des habitants de Hohatzenheim restèrent protestants après 1687 et la prévôté de Hohatzenheim ne passa aux catholiques qu’en 1730.

 

Anecdote : Foesser cite un passage de la chronique de l’église de Mittelhausen où est mentionné le cas de deux femmes protestantes de Hohatzenheim et de leur petit-fils de Berstett et Olwisheim qui avaient du mal à se rendre a Mittelhausen pour assister à la messe. Par suite de leur plainte, le gouvernement mit a leur disposition une charrette qui les conduisit tout les dimanche à Mittelhausen et les ramena, le tout sur les deniers publics.

 

 

 

 



[1] Wingersheim und seine Filialen Hohatzenheim, Donnenheim, Mittelhausen” 1932

[2] Bez. Arch. Strg. 5462 Theobalds’ Groscher Leutpriester zu Hohe-Atzenheim Bestallung. Am « Freitag nach dem hl. Ostertag 1532 » unterzeichnet Theobald Grosher aus Sennheim, Priester des Basler Bistums seine Anstellung « als Leutpriester der Pfarrkirche zu Hohatzenheim und Filial » die er mit einem « Adjuzmann oder Kaplan » den er auf seine Kosten jalten soll, verwalten will gegen ein Einkommen von 52 Viertel Korn 10 Viertel Weizen, 2 ½ Fuder Wein, dazu den Blut-Flachs- und Weizenzehnten. Ratgeber  bezeichnet ihn (p.92) als « einen Freund M. Luthers, be dem er sich in Wittenberg ofters Rat holte »

[3] « Evangelische Kirchengeschichte der Elsaessischen Territorien bis zur Franzoesischen Revolution »


Eglise de Hohatzenheim

Eglise de Hohatzenheim
Dessin de Marius Meyer (1944)